Connaissez-vous Massassoit, le vieux sage de la nation wampanoag, Jean-Baptiste Faribault et Jean Baptiste Eugène Laframboise, ces aventuriers canadiens-français qui ont bâti l'Ouest américain, ou l'oncle Yvan, revenu de la guerre alors que plus personne ne l'attendait, ou la tante Monique de Santa Monica ? Saviez-vous qu'une vieille Honda était douée de la parole, qu'une grande tortue sacrée vivait sur le boulevard Pie-IX, qu'un camion des années 1950 avait des yeux, et que ces yeux pouvaient parfois être tristes ? Voilà quelques-unes des merveilles que l'on découvre ici, ainsi que mille autres, grandioses ou infimes, lointaines ou familières, cachées dans le passé que nous avons oublié, chez les humbles que nous n'écoutons plus, ou bien là, tout près, dans la nature qui nous entoure comme dans la ville que nous habitons, mais que notre modernité trépidante et notre obsession de la vitesse et de l'efficacité nous empêchent de saisir. Après C'était au temps des mammouths laineux (2012), voici de nouveau une trentaine de petits essais écrits avec cet art qui est la marque unique de Serge Bouchard, le timbre même de sa voix : un art qui est à la fois celui de l'anthropologue, nourri par une attention passionnée aux visages et aux récits inépuisables des humains, et celui du poète, confiant dans les pouvoirs révélateurs de l'imagination et du langage. « Qu'il parle de son vieux Mack, de baseball ou de ragoût de boulettes, ou encore de la présence canadienne-française sur le territoire américain, de ses oncles héros de guerre ou des Amérindiens, Serge Bouchard n'a pas son pareil pour dévoiler la beauté du monde. À travers son regard poétique, son amour de la race humaine, sa nord-américanité bien assumée, il transforme l'ordinaire en merveilleux. Du coup, le lecteur éprouve une certaine fierté à redécouvrir son patrimoine en découvrant Les yeux tristes de mon camion.» Manon Dumais, Le Devoir