Tout y est passé : « tapette », bien sûr, « fucké », « malade dans la tête », « heap »... Plus je vieillissais, moins il comprenait qui j'étais. Je suis donc devenu une « tapette ». Ça, c'est arrivé après un souper où ma soeur Jacqueline nous avait raconté avoir été victime d'une agression, d'une tentative de viol. Elle avait réussi à s'échapper en frappant le gars, mais c'était grave, et j'avais insisté pour que nous allions déposer une plainte à la police. Nous avions à peine 18 ou 19 ans. Un peu plus tard dans la même soirée, alors que j'étais seul avec mon père, il est entré dans une colère noire et m'a traité de « tapette ». J'oublie de dire qu'il avait déjà été policier municipal. Est-ce la honte qui a animé sa colère ? Celle d'imaginer aller voir ses vieux copains pour parler de l'agression de sa fille. Il n'y a pas eu de plainte. Ma mère a voulu me rassurer en m'affirmant que mon père ne croyait pas ce qu'il avait dit. Je n'étais pas, bien sûr, une « tapette ».